Contrairement à ce que le Canadien avait déclaré, Carey Price a affirmé mardi qu’il était au fait de la tragédie de Polytechnique. Ce qui signifie que l’une des deux parties ment, affirment des experts en gestion de l’image publique.
Et «la règle de base en gestion de crise, c’est de ne pas mentir», explique Sophie Villeneuve, vice-présidente stratégie chez Catapulte.
Aux yeux de Mme Villeneuve, «le Canadien vient s’inscrire dans un déficit de crédibilité, car il y a une déclaration formelle qui a été désavouée».
«Pour [l’organisation], cela pourrait avoir un impact au niveau de la crédibilité auprès des journalistes et du public, quand elle va tenter de dévier une histoire ou d’amener des excuses », précise-t-elle.
«Ce n’est pas par une recrue qui pourrait plaider qu’elle n’est pas habituée à concilier avec des enjeux publics, ajoute Mme Villeneuve. Price, ça fait 15 ans qu’il a un micro sous le nez après chaque match, après chaque entraînement. Il connaît le fonctionnement de tout ça.»
Lundi, France Margaret Bélanger, présidente, sports et divertissement du Groupe CH, a dit à Radio-Canada que Price «n’était pas au courant des événements tragiques du 6 décembre 1989».
Price ne savait pas plus des initiatives marketing de la Coalition canadienne pour les droits des armes à feu [CCDAF], qui offrait aux clients magasinant des articles à son effigie d’utiliser le code promotionnel «POLY» pour obtenir un rabais.
Il comprend «le poids»
Puis, mardi, Price a démenti cette affirmation par l’entremise de son compte Instagram.
«Malgré une déclaration publiée précédemment, j’étais au courant de la tragédie », a-t-il publié, mentionnant également qu’il « fait partie de la communauté montréalaise depuis 15 ans » et « qu’il comprend le poids que cette journée représente dans la communauté.»
«Soit Carey Price n’était pas au courant, mais il n’a pas voulu porter le poids de dire qu’il a été à Montréal pendant 15 ans et qu’il n’était pas au fait d’une telle tragédie, soit le Canadien a voulu l’excuser et ne pas porter l’odieux d’une telle affirmation», s’interroge Mme Villeneuve.
«Visiblement, la coordination ne s’est pas faite ou l’une des deux parties n’a pas dit la vérité, c’est possible», a analysé Patrick Howe, président de Consulat RP, en entrevue à LCN.
Un «bris de confiance»
M. Howe se disait aussi «curieux de savoir comme le Canadien allait [maintenant] réagir», considérant que les options de l’organisation «étaient limitées».
Mme Villeneuve, elle, estime «que quelqu’un va devoir prendre le blâme pour un mensonge et ça, c’est un bris de confiance».
«Publiquement, c’est un prix très lourd à payer.»
France Margaret Bélanger et Geoff Molson, le propriétaire et président du Canadien, ne donneront pas d’entrevue à ce sujet, a d’ailleurs répondu l’organisation aux demandes du Journal.
«Indécent»
La controverse a trouvé écho jusqu’à l’Assemblée nationale, mardi, en cette journée de commémoration de la tragédie. Le gardien y a essuyé des critiques des libéraux et des solidaires.
Chef par intérim du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay, a jugé que Price a fait preuve d’un «manque de jugement», tandis que Manon Massé, la porte-parole de Québec solidaire, a qualifié «d’indécent» l’appui du numéro 31 à la CCDAF.
Paul St-Pierre Plamondon s’en est plutôt pris à ceux qui ont «mal informé» Price. «Ce que je veux savoir, c’est qui [l’]a approché en préparation de cette sortie ?» a commenté le chef du Parti Québécois.
Même si la polémique des derniers jours «n’est bonne pour personne» et que «c’est sûr qu’il y a des échanges qui n’ont pas eu lieu», Bernard Motulsky, professeur au Département de communication sociale et publique de l’UQAM, croit que Carey Price a peut-être remis «un peu le couvercle sur la marmite».
«Ce sont des excuses, il s’est expliqué. Il n’y a pas grand-chose d’autre à dire que ça», estime M. Motulsky.
– Avec la collaboration de Jean-François Chaumont et de Gabriel Côté, Agence QMI